Illustration : Rosalie Lemire
J’avais presque 22 ans quand j’ai eu ma première relation sexuelle sur un one night Tinder. Le sentiment d’être en retard sur les autres et de ne pas comprendre tout un langage , toute une mécanique essentielle à la vie était en train de me rendre vraiment malheureuse.
J’avais l’impression que je ne pourrais pas être pleinement adulte tant que je n’aurais pas été intime avec quelqu’un.
Je n’avais jamais eu la « chance » d’avoir un chum au secondaire ou de fréquenter des gars pour me découvrir et expérimenter comme les filles de mon entourage, et le fossé se creusait entre « ceux qui savaient » et moi, qui ne savait pas. J’ai souvent bu de fausses gorgées à Never Have I Ever ou esquivé avec peu d’adresse les questions embarassantes qui semblaient anodines à tous. On aurait dit que c’était écrit dans ma face à l’université, que je ne dégageais aucun sex-appeal à cause de mon aura de vierge, et donc qu’aucun gars ne serait attiré par moi.
J’ai perdu ma virginité sur une première date Tinder parce que je n’étais plus capable d’attendre un gars avec qui ça progresserait lentement et sûrement et qui allait potentiellement devenir ce fameux chum. Je me disais que je n’avais plus le temps ni la patience pour ça. Il fallait que ça se passe. Heureusement, le gars a été très gentil, doux et surtout patient. Ça lui faisait vraiment plaisir de m’aider à franchir cette étape-là, qui était très importante pour moi. Il m’a demandé si je préférais attendre d’être avec un gars que je connaissais et en qui j’aurais plus confiance. Mais j’en avais envie et besoin à ce moment-là ! J’aurais pu mal tomber et vivre une expérience désastreuse, mais j’ai été chanceuse. (Oui, on en est encore à se dire que c’est une chance qu’un gars soit respectueux alors que ça devrait être normal ). J’y repense toujours avec beaucoup de tendresse à son égard.
Je n’ai jamais revu ce gars-là après. En partie, je pense, parce qu’il avait peur que je m’attache à lui. C’est vrai que j’ai tout de suite cru avoir trouvé un partenaire de galipettes, et qu’on remettrait ça : practice makes perfect… Et pourtant ! Ça aura pris un an avant que je me retrouve dans le lit d’un autre, et j’étais tout aussi maladroite. Néanmoins, je me sentais vraiment mieux après cette première fois. Plus confiante. La peur de l’inconnu s’était dissipée.
Après avoir vécu ma première fois, j’ai commencé à vouloir prendre soin de moi, à avoir envie d’être séduisante et sexy pour moi toute seule. J’ai découvert que la lingerie me fait sentir belle et forte. La plupart du temps, ça reste un secret bien gardé en dessous d’un bon vieux combo jean-t-shirt, mais ça me rend fière et plus fonceuse.
Aujourd’hui, à 27 ans, j’ai largement rattrapé le «retard» que je pensais avoir et j’ai l’impression que ce qui est écrit dans ma face, c’est que je n’ai besoin de personne !