Femme sur une vague avec un visage en orgasme

« Femme fontaine » : le squirting démystifié

Résumé

Malgré tout le splash que génère le squirting dans les médias populaires et la pornographie, c’est un phénomène qui demeure relativement peu (et mal) compris. Le squirting, c’est quoi, exactement? Comment ça arrive? Does it feel good? On démystifie tout ça dans cet article.

Selon la recherche OMGyes, environ 41 % des personnes dotées d’un utérus ont déjà expérimenté le squirting pendant les activités sexuelles. Et c’est un phénomène qui fait couler beaucoup d’encre. Une recherche rapido sur Google pour le terme squirting génère plus d’un milliard de résultats (!!!) tentant d’instruire le lectorat sur non seulement ce que c’est, mais sur comment y arriver ou comment s’y prendre pour faire gicler un·e partenaire (et, bon, pas mal de résultats pornos aussi). Justement, l’intérêt pour le squirting est si grand que la plupart des sites pornographiques lui dédient une catégorie.

Malgré tout le splash que génère le squirting dans les médias populaires et la pornographie, c’est un phénomène qui demeure relativement peu (et mal) compris.

Le squirting, c’est quoi, exactement? Comment ça arrive? Does it feel good? Je démystifie tout ça dans cet article.

Le squirt, est-ce que c’est de l’urine?

Short answer : oui.

Long answer : tout d’abord, le squirting chez les personnes dotées d’un utérus, c’est l’expulsion de fluide par l’urètre pendant une stimulation sexuelle. Ce volume peut varier d’une demi-cuillère à thé à plus d’une demi-tasse (Wimpissinger et al., 2013). Bien qu’il se produise souvent juste avant, pendant ou juste après l’orgasme, le phénomène peut aussi avoir lieu sans orgasme.

Donc, si ça sort par l’urètre, ça provient de la vessie, right? Selon deux études ayant examiné la nature de ce fluide, la réponse est oui.

Dans une de ces études, à l’aide de l’échographie, on a constaté que la vessie était vide avant la stimulation sexuelle, qu’elle se remplissait rapidement pendant le stimulus (avant le squirting), et qu’elle était vide de nouveau après le squirting (Salama et al., 2015). Dans l’autre étude, on a injecté un colorant bleu directement dans la vessie à travers l’abdomen avec une longue seringue avant la stimulation sexuelle. Sans surprise, le liquide squirté était bleu (Inoue et al., 2022).

Dans les deux études, on a analysé le squirt et on a constaté que ce liquide est composé de taux d’urée, de créatinine et d’acide urique comparables à ceux qu’on retrouve dans l’urine. Cependant, dans environ la moitié des échantillons, le fluide contient aussi des antigènes prostatiques spécifiques produits par les glandes de Skene chez les personnes nées avec un utérus (ou par la prostate chez les personnes nées avec un pénis, et par conséquent dans le sperme.)

Donc, pour répondre à la question « le squirt, est-ce que c’est de l’urine? » : oui — c’est juste que dans la moitié des cas, un peu de liquide expulsé par les glandes de Skene s’y est mélangé.

Mais alors, pourquoi plusieurs personnes maintiennent qu’il ne s’agit pas d’urine?

Dans la majorité des cas, ce liquide ne ressemble pas à l’urine. Il n’a ni la même couleur ni la même odeur. Le squirt est clair comme de l’eau dans plus de 80 % des cas, sinon d’apparence légèrement laiteuse (Wimpissinger et al., 2013). Cependant, cela serait surtout dû au fait qu’il s’agisse d’urine non concentrée (on se rappelle que la vessie se remplit rapidement pendant la stimulation sexuelle), comme celle qu’on produit lorsqu’on boit beaucoup d’eau en très peu de temps.

Une autre raison pour laquelle les gens s’accrochent à l’idée que le squirt n’est pas de l’urine est due au fait qu’on confond très souvent l’éjaculation et le squirt, et ce, même dans les écrits scientifiques. Certains dictionnaires traduisent même, à tort, squirting par éjaculation. Ce sont pourtant deux liquides différents provenant de structures différentes (Rodriguez et al., 2021) : alors que l’éjaculation est une toute petite quantité de liquide blanchâtre produit par les glandes de Skene et expulsé par les ostiums péri urétraux (minis ouvertures de chaque côté de l’urètre), le squirt est une plus grande quantité de liquide expulsé de la vessie par l’urètre.

Le problème reste qu’en français, bien qu’on ait le terme femme fontaine (qui n’est d’ailleurs pas très inclusif), il ne semble pas vraiment y avoir un mot équivalent pour désigner le squirt.

Devrait-on l’inventer? La giclée, le jus de fontaine ou l’éjaculatine? C’est peut-être une discussion pour une autre fois. Bon d’accord, en attendant, on reste avec squirt.

Enfin, c’est aussi parce qu’on considère que l’urine, c’est « sale » (après tout, c’est un déchet corporel). De plus, intégrer de l’urine aux activités sexuelles a longtemps été considéré comme tabou, voire paraphilique. Par conséquent, en différenciant le squirt de l’urine, plusieurs personnes s’évitent la possibilité de ressentir de la honte à l’égard de « pisser » pendant les relations sexuelles.

Cela dit, il n’y a pas de quoi avoir honte si (ou quand) on squirt! On étend une serviette ultra absorbante sur le lit avant de get down, et voilà! On est prêt·e à faire des vagues! D’ailleurs, certaines boutiques érotiques vendent même des draps conçus spécifiquement pour les personnes qui squirtent.

Le squirting, est-ce que ça sert à quelque chose?

La question se pose : si plusieurs personnes squirtent et que la plupart des personnes dotées d’un utérus en sont capables, peut-on alors dire que c’est une adaptation évolutionniste? Dit autrement, est-ce que le squirting est un trait qui favorise la survie ou la reproduction de l’espèce humaine?

En fait, personne ne le sait vraiment. Cependant, j’ai une hypothèse quant à un possible avantage. Puisque le risque de développer une infection urinaire augmente quand on prend part à des activités sexuelles (Vasudevan, 2014) et que de vider sa vessie régulièrement (mais surtout complètement; Storme et al., 2019) diminue la probabilité de développer une telle infection, le fait que notre vessie se remplisse rapidement pendant la stimulation sexuelle nous incite à aller la vider par la suite, nous évitant ainsi une infection potentielle. Il n’y aurait donc peut-être pas d’avantage évolutionniste spécifique au squirting comme tel, mais plutôt à ce que que la vessie se remplisse pendant la stimulation sexuelle.

Comment on s’y prend pour squirter?

The thing is, comme pas mal tout ce qui a rapport à la sexualité, ça varie d’une personne à l’autre. Environ la moitié des personnes ayant déjà expérimenté le squirting ont dit qu’il survient pendant une stimulation du clitoris, tandis que l’autre moitié a rapporté qu’il survenait pendant une stimulation vaginale (Wimpissinger et al., 2013), notamment en stimulant le point G.

Le point G, « découvert » par le Dr. Ernest Gräfenberg en 1940 — d’où l’origine de son nom (la première lettre de Gräfenberg) — est une zone érogène située dans le premier tiers du vagin, sur sa paroi antérieure, près de l’urètre et de la vessie. Elle a la taille d’une piasse et une texture plus « rugueuse » que le reste des parois vaginales. On peut y accéder et la stimuler en introduisant deux doigts dans le vagin puis en faisant un geste de type « viens par ici », ou à l’aide d’un jouet sexuel adapté pour ce genre de stimulation.

Peu importe le type de stimulation, selon la recherche OMGyes, une personne est plus susceptible de squirter avec :

  • une stimulation constante;
  • en détendant ses muscles pelviens; et/ou,
  • quand son ou sa partenaire augmente soudainement la vitesse ou la pression de la stimulation.

Dans tous les cas, ça aide aussi de lâcher prise (sortir de sa tête, se détendre, être dans le moment présent et se libérer de ses complexes) ainsi qu’ignorer la sensation d’avoir besoin d’uriner.

Pis, est-ce que ça vaut la peine?

Certaines personnes trouvent qu’une stimulation du point G leur procure des sensations agréables (si c’est de cette manière qu’elles arrivent à squirter), tandis que d’autres les trouvent agaçantes ou trop intenses. Par ailleurs, certaines personnes adorent la sensation de squirter, mais n’aiment pas avoir à préparer le lit en prévision ou à gérer le petit dégât d’eau après que le fun soit terminé. Et d’autres ne parviennent pas à squirter, n’aiment tout simplement pas avoir la sensation d’urgence-pipi pendant les activités sexuelles ou trouvent qu’elle noie (hihi!) les autres sensations érotiques agréables. #SensoryOverload

Une chose est certaine : le squirting n’est pas universellement apprécié ou agréable.

Encore une fois, ça dépend de la personne. C’est vraiment correct d’aimer — ou de ne pas aimer — squirter. À chacun son trip! L’important, c’est d’écouter et de respecter ses besoins et ses désirs sexuels. You do you. Le même message s’applique aux partenaires de personnes nées avec une vulve : c’est toujours une bonne idée de leur demander si c’est quelque chose qui les intéresse avant d’essayer de les faire squirter.

Cette article te donne envie d’en savoir plus sur la vulve et le vagin? Dans cet article, la chercheuse en sexologie Léa Séguin démystifie plusieurs mythes, comme la peur de devenir « lousse ».

  • American Psychiatric Association. (2013). Diagnostic and statistical manual of mental disorders fifth edition (DSM-5). American Psychiatric Association.

    Crooks, R. L. et Baur, K. (2017). Nos sexualités. Modulo.

    Hara, R., Nagai, A., Nakatsuka, T., Ohira, S., Fujii, T. et Miyaji, Y. (2018). Male squirting: Analysis of one case using color Doppler ultrasonography. IJU Case Reports, 1(1), 19–21. https://doi.org/10.1002/iju5.12021

    Hensel, D. J., Von Hippel, C. D., Sandidge, R., Lapage, C. C., Zelin, N. S., et Perkins, R. H. (2022). “OMG, Yes!”: Feasibility, Acceptability, and Preliminary Efficacy of an Online Intervention for Female Sexual Pleasure. The Journal of Sex Research, 59(3), 269–282. https://doi.org/10.1080/00224499.2021.1912277

    Hoag, N., Keast, J. R. et O’Connell, H. E. (2017). The “G-Spot” is not a structure evident on macroscopic anatomic dissection of the vaginal wall. The Journal of Sexual Medicine, 14(12), 1524–1532. https://doi.org/10.1016/j.jsxm.2017.10.071 

    Inoue, M., Sekiguchi, Y., Ninomiya, N., Kobayashi, T. et Araki, M. (2022). Enhanced visualization of female squirting. International Journal of Urology, 29(11), 1368–1370. https://doi.org/10.1111/iju.15004 

    Rodriguez, F. D., Camacho, A., Bordes, S. J., Gardner, B., Levin, R. J. et Tubbs, R. S. (2021). Female ejaculation: An update on anatomy, history, and controversies. Clinical Anatomy, 34(1), 103–107. https://doi.org/10.1002/ca.23654 

    Salama, S., Boitrelle, F., Gauquelin, A., Malagrida, L., Thiounn, N. et Desvaux, P. (2015). Nature and origin of “squirting” in female sexuality. The Journal of Sexual Medicine, 12(3), 661–666. https://doi.org/10.1111/jsm.12799 

    Storme, O., Tirán Saucedo, J., Garcia-Mora, A., Dehesa-Dávila, M. et Naber, K. G. (2019). Risk factors and predisposing conditions for urinary tract infection. Therapeutic Advances in Urology, 11, 12–28. https://doi.org/10.1177/1756287218814382 

    Vasudevan, R. (2014). Urinary tract infection: An overview of the infection and the associated risk factors. Journal of Microbiology & Experimentation, 1(2), 42–54. https://doi.org/10.15406/jmen.2014.01.00008  

    Wimpissinger, F., Springer, C. et Stackl, W. (2013). International online survey: female ejaculation has a positive impact on women’s and their partners’ sexual lives. BJU International, 112(2), E177–E185. https://doi.org/10.1111/j.1464-410X.2012.11562.x