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Traumavertissement : agression sexuelle, slut shaming
Le classique. Girl meet guy on Tinder. Quelques dates plus tard, le potentiel amoureux écarté, je me dis qu’au moins nous avons une chimie sexuelle – et autant en profiter.
Oh boy, was I wrong. On s’est vu·e·s quelques fois et on s’est perdu·e·s de vue, car j’étais partie en voyage quelque temps. De retour à Montréal, je le croise par hasard lors d’une chaude nuit d’été. Le flirt recommence et, à la fin de la soirée, on se retrouve dans un parc.
Cette soirée-là, je me sentais bien, j’avais envie d’une rencontre simple et passionnelle entre deux personnes dont les corps ont déjà fait connaissance. Étant amant·e·s occasionnel·le·s, on mettait toujours un condom pour toutes les bonnes raisons. Mais j’ai compris que quelque chose était off quand il s’est retiré avant de venir.
Je lui ai demandé pourquoi il venait de faire ça. Et lui de me répondre le plus candidement du monde : « Ah, j’ai enlevé le condom. »
Tout mon corps s’est raidi. J’étais sous le choc.
C’est à ce moment que lui aussi a compris. C’est comme s’il venait de réaliser l’ampleur de son geste.
Il a commencé à se confondre en excuses, à se justifier : « Mais c’est correct, je me suis retiré, il n’y a pas de danger que tu tombes enceinte. »
Cette phrase a eu l’effet d’une seconde bombe et m’a sortie de ma stupeur. J’ai pris ses choses, je les lui ai lancées au visage en lui disant : « Ce n’est pas à toi de prendre cette décision. Tu me parles de tomber enceinte, mais as-tu pensé aux ITSS? As-tu pensé au liquide pré-éjaculatoire, sais-tu seulement ce que c’est? De toute façon, ce n’est pas à toi de prendre cette décision, tu n’avais pas le droit de faire ça. »
Je suis partie la rage au coeur.
Mon premier réflexe a été de prendre une douche, pour essayer de laver le dégoût et la colère qui m’habitaient. Il continuait à me texter, à se confondre en excuses. Les excuses sont bien pâles devant un geste qui outrepasse le respect et le consentement.
Je ne comprends pas comment un grown man – on parle d’un homme éduqué de 30 ans – peut faire fi des principes de consentement et du port du condom! Pour clore la conversation, car le mal était fait, je lui ai dit qu’il avait complètement ruiné ce qui aurait pu être un beau moment.
Je me sentais dépossédée de ma liberté sexuelle.
Parce que tant qu’à être célibataire, autant l’assumer et profiter de ma sexualité. Mais apparemment, même en voulant me l’approprier, j’ai été vivement rappelée à l’ordre en me faisant dérober mon droit au plaisir dans le consentement.
Je me sentais trahie, sale.
Le lendemain, j’avais une boule au ventre et dès que j’y pensais, je me crispais. Je n’avais plus de libido. Il a fallu quelque temps après avoir passé un test de dépistage et reçu les résultats négatifs (thank god) pour que finalement une pointe d’envie sexuelle revienne.
J’ai coupé tout contact avec cet homme, mais je lui en veux encore.
Je n’ai pas de honte à raconter cette histoire. Au contraire, il faut être conscient·e de l’existence de cet abus de confiance, de ce consentement arraché, de ce manque cruel en matière d’éducation sexuelle dans une société qui se dit pourtant développée.
Une amie à qui j’en ai parlé, bien que dépourvue de mauvaises intentions, m’a répondu quelque chose de fort blessant : « Il faudrait peut-être que tu donnes ton amour aux hommes qui le méritent. »
Cette réaction démontre à quel point l’enjeu est mal compris. En m’engageant dans cette relation sexuelle que je croyais protégée, je n’avais pas l’intention de donner mon amour, je voulais seulement vivre une activité sexuelle entre deux personnes adultes consentantes. Je ne pouvais pas prévoir la finalité de cet acte, je l’ai subi.
La réaction de mon amie, c’est aussi encore une fois mettre la faute sur la personne qui a subi l’agression, lui dire qu’elle aurait dû prévoir le coup, faire un choix différent.
Il a fait un choix à ma place.
Dans certains pays, le stealthing est considéré comme une agression sexuelle. Au Canada, ce n’est actuellement pas inclus dans la loi, l’accent étant plutôt mis sur le consentement requis d’un partenaire – par exemple en acceptant d’avoir des rapports sexuels uniquement avec une protection, tel le préservatif –, ce qui permet de l’interpréter aux yeux de la loi comme un crime.
Mais au-delà de l’aspect légal, il faut que les hommes comprennent qu’il n’est pas dans leur droit de prendre cette décision, et je ne veux pas connaître leurs raisons : aucune raison ne justifie cet acte.
Bergeron, M., Hébert, M., Ricci, S., Goyer, M. F., Duhamel, N., Kurtzman, L., … et Parent, S. (2016). Violences sexuelles en milieu universitaire au Québec: Rapport de recherche de l’enquête ESSIMU. https://constellation.uqac.ca/id/eprint/4098/1/Rapport_ESSIMU_FINAL.pdf
Division of Reproductive Health, National Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion. (2013). US selected practice recommendations for contraceptive use, 2013: Adapted from the World Health Organization selected practice recommendations for contraceptive use. Morbidity and Mortality Weekly Report: Recommendations and Reports, 62(5), 1–60. https://www.cdc.gov/mmwr/preview/mmwrhtml/rr6205a1.htm
Lambert, G., Mathieu-Chartier, S., Goggin, P., Maurais, E. et l’Équipe de recherche PIXEL. (2017, September 19). Étude PIXEL – Portrait de la santé sexuelle des jeunes adultes québécois. Institut national de santé publique du Québec. https://www.inspq.qc.ca/publications/2307#:~:text=L’objectif%20de%20l’%C3%A9tude,et%20le%20bien%2D%C3%AAtre%20sexuel