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Résumé
Ne pas répondre trop rapidement, se laisser désirer, ne pas faire de fautes, ne pas se révéler trop vite, utiliser les bons émojis et les bonnes photos… Ouf, le dating en ligne regorge de règles non écrites et de scripts qui ont de quoi étourdir. On les décortique en s’intéressant aux différences en fonction de l’orientation sexuelle.
Cet article est présenté par Fruitz.
« Non, ne lui réponds pas tout de suite, sinon tu vas avoir l’air needy. Laisse un peu de temps passer, aie l’air busy busy. Laisse-toi désirer. »
Qui n’a pas déjà reçu ce conseil alors qu’il ou elle s’apprêtait à répondre à une personne sur une application de rencontres? L’adage « Suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis » semble faire légion dans ce monde numérique où, pour se démarquer du nombre, il faut jouer un jeu de désirabilité, révéler ses cartes au compte-gouttes, patenter savamment des réponses bien écrites et gorgées de sous-entendus, mais sans jamais avoir l’air trop ci, ou trop ça, trop trop trop.
Bref, en vrai funambule du dating, on navigue sur une corde raide qui ressemble plus à un jeu de Démineur qu’à une quête de connexion humaine. Tentons ensemble de voir qu’elle forme elle prend, cette cr*** de game. Allez, on attrape la cerise par les cornes, et on part!
Parmi les grands turn off sur les applications de rencontres, les erreurs de langage et les fautes d’orthographe frappent fort. Elles seraient associées à une perception négative du niveau d’intelligence, de l’éducation et des traits de personnalité (Van der Zanden et al., 2020).
Qui sait, peut-être es-tu passé·e à côté de ton âme sœur parce que son « slt sa va? » t’a rebuté! Cette perception du niveau de langage a assurément un côté élitiste qui associe maitrise de la langue et désirabilité. Cela peut aussi montrer qu’on a tendance à ressentir de l’attirance envers des personnes qui correspondent à notre classe sociale et à notre niveau d’éducation.
Au palmarès des no no de la game du dating se trouvent aussi les photos floues ou de mauvaise qualité (Van der Zanden et al., 2020). Les photos de profil sont souvent jugées comme l’élément le plus attrayant sur les app. Des photos pixelisées, mal cadrées, floues, ou en groupe sont des irritants qui peuvent faire fuir l’intérêt ffffffffudgin’ vite.
Au contraire, parmi les gros turn on sur les app de rencontres, on retrouve l’autodérision et le partage de points communs. Eh oui! L’autodérision serait utilisée pour exprimer une image de soi plus nuancée et authentique (Sharabi et Dykstra-DeVette, 2019). Quelqu’un·e qui ne se prend pas trop au sérieux, qui est capable de rire de soi : ça score fort sur les app!
D’un autre côté, on aurait le réflexe d’interagir avec des profils partageant des intérêts, des valeurs ou des styles de vie similaires aux nôtres (Gary et al., 2018). Cette particularité fait en sorte qu’on aura souvent tendance à créer un « soi idéal » en fonction de la personne à qui on parle, pour créer une impression de similarité avec elle. Bref, on joue au caméléon pour se faire désirer.
Tu n’es pas taaaaaaant in love avec les sushis, mais tu vois que l’autre personne a un petit émoji de maki dans sa bio? Soudainement, tu name drop des mots comme « wasabi », « Japon» et « saké » dans la convo en soulignant ton amour sans fin pour les sashimis. That’s the « soi idéal » for you.
Les émojis feraient d’ailleurs partie d’un jeu d’aller-retour où chacun·e teste les intentions de l’autre et manifeste son intérêt par des suggestions. Je ne peux pas m’empêcher de penser à ces paroles de la chanson Sexting de l’humoriste Bo Burnahm (0:34) :
Quand une personne utilise des émojis pour signaler son intérêt, par exemple en employant des émojis à connotation sexuelle (Hello 💦🍑🔥🍒🍆), l’autre partenaire peut soit répondre de manière similaire et confirmer un intérêt sexuel mutuel, soit s’abstenir de le faire et signaler un désintérêt. Indeed, se faire répondre un émoji d’erlenmeyer après qu’on ait sorti la pêche et la flamme, ça fesse dans l’dash.
Hélas, les cocos, ne pas participer à ce jeu de flirt ne semble pas être une option. Comment ça? La réciprocité ou non sont des actes communicatifs qui signalent l’intérêt ou le désintérêt, que l’utilisateur·trice en ait l’intention ou non. Le fait de ne pas recevoir d’émoji en retour peut donner le sentiment que l’autre n’est pas intéressé·e et engendrer des sentiments d’insécurité (Nexøet Strandell, 2020).
Les personnes straights sont souvent davantage engluées dans de vieilles traditions du dating et sont peut-être les plus grandes victimes de cette fameuse game. Eh oui, les rôles de genre traditionnels persistent jusqu’aux applications de rencontres.
Les femmes sont souvent confrontées à l’attente que les hommes prennent l’initiative des conversations, des invitations et des avances sexuelles. De leur côté, les hommes sont systématiquement plus enclins à initier des conversations sexu, des « appels coquins » et des one nights. Tout ça fait en sorte que les femmes disent se sentir moins à l’aise de communiquer des besoins ou des désirs sexuels (Christensen, 2021).
L’arrivée progressive des « hybrid hookups scripts » a placé les femmes dans une situation particulièrement délicate. Les comment? Les hybrid hookup script, ce sont des rendez-vous, généralement informels (un verre dans un bar), qui servent à vérifier l’authenticité des profils, à évaluer la compatibilité et à instaurer un début de relation, même si l’objectif final reste d’avoir une relation sexuelle (Christensen, 2021). Le hookup est parfois la finalité, parfois une façon de tester les eaux et parfois les deux. Les femmes se retrouvent alors dans une impasse puisque c’est en contradiction avec le script traditionnel selon lequel les femmes datent seulement pour être en relation.
Résultat? Ce script hybride crée une double contrainte pour les femmes : elles doivent jongler entre le désir de trouver une relation amoureuse authentique ET avec la peur d’être jugées négativement si elles expriment clairement l’attente d’avoir un hookup le premier soir (lire ici : slutshamées ).
La sécurité des femmes est d’ailleurs un enjeu au cœur de leur expérience de dating en ligne (Christensen, 2021). La première date est l’occasion pour beaucoup de femmes de vérifier l’authenticité de la personne et de mesurer leur sentiment de sécurité envers elle. Voici d’ailleurs un article en collaboration avec Fruitz qui présente quelques trucs pour maximiser sa sécurité lors d’un premier rendez-vous. Fort pratique, peu importe le genre auquel tu t’identifies.
Pour les personnes queer, les règles et les réalités du dating en ligne semblent variées légèrement. Il ne s’agit pas ici de les isoler de la réalité des personnes cis et hétéros (plusieurs des règles s’entrecoupent peu importe les identités de genre et sexuelles), mais simplement d’en faire ressortir des lignes de force.
L’homophobie, la transphobie ou l’homosexualité refoulée peuvent aussi poser une préoccupation par rapport au dévoilement de l’identité sur les app. Certaines personnes queer utilisent des photos de profil sans visage, comme un paysage, une photo vierge ou carrément aucune photo, pour cacher leur identité (Cui et al. 2022). Ces profils sans visage sont forcément désavantagés pour rencontrer d’autres personnes, car plusieurs utilisateur·trice·s n’interagissent pas avec ces profils (Blackwell et al., 2016). Il est aussi courant d’afficher « NPNC » (No pic no chat, ou « pas de photo, pas de discussion ») dans sa bio pour décourager ce genre de profil à interagir avec soi.
Le talon (aiguille) d’Achille du dating queer en ligne semble être la difficulté à discerner les intentions des utilisateur·trice·s : les applications de dating pour hommes gais regroupent des individus ayant des objectifs différents (rencontres sexuelles, rendez-vous, amitié), ce qui rend difficile la compréhension des intentions des autres utilisateurs (Blackwell et al., 2016). L’un des passages obligés dans le dating queer semble être de demander à la personne de clarifier ses intentions, en envoyant le message « looking? » ou, en français, « tu cherches quoi ici? »
Les profils, bien que contenant des indices tels que le type de photo (photo de toi à la pêche ou photo de tes pêches) et le champ « recherche », ne reflètent pas toujours fidèlement les intentions réelles des utilisateur·trice·s. Parfois, ils disent rechercher des ami·e·s, mais l’intention peut également être de trouver des fuck friends.
Bottom line? C’est important d’afficher ses intentions réelles et son statut relationnel afin de ne pas amener les autres à faire fausse route.
On sauve ainsi beaucoup de temps à tout le monde.
Les « sexfies » non sollicités demeurent également une réalité du dating gai (mais pas que!). Le scénario conversationnel « Salut, ça va, voici ma graine » est monnaie courante sur certaines applications de rencontres gaies. Ces micro-agressions peinent à être dénoncées par la communauté, et je pense vraiment qu’un changement de mentalité s’impose. J’y reviendrai peut-être dans un prochain article. #StopSendingYourDick
Peu importe ton genre ou ton orientation, ce fouillis de règles peut certainement donner le tournis. En résumé? Il semble qu’on joue une game pour plaire aux autres et se conformer au scénario social qui est attendu de nous ou de notre genre.
Quels que soient tes objectifs de dating ou ton identité, l’important, c’est de faire preuve d’honnêteté et de respect sur les applications. Affiche clairement tes intentions, propose rapidement un rendez-vous en chair et en ass pour confirmer l’intérêt commun (toujours dans un environnement sécuritaire) et tente autant que possible de ne pas ghoster les personnes avec qui tu as entamé une conversation.
Pour trouver un·e partenaire dans un environnement transparent, je t’encourage à télécharger l’application Fruitz, pour les histoires d’une vie… ou d’une nuit. Une app pour tous les goûts et toutes les règles. 🍒
Blackwell, C., Birnholtz, J., & Abbott, C. (2015). Seeing and being seen: Co-situation and impression formation using Grindr, a location-aware gay dating app. New Media & Society, 17(7), 1117–1136.
Comunello, F., Parisi, L., & Ieracitano, F. (2021). Negotiating gender scripts in mobile dating apps: between affordances, usage norms and practices. Information, Communication & Society, 24(8), 1140–1156. https://doi.org/10.1080/1369118X.2020.1787485
Christensen, M. A. (2021). « Tindersluts″ and « Tinderellas″: Examining the Digital Affordances Shaping the (Hetero) Sexual Scripts of Young Womxn on Tinder. Sociological Perspectives, 64(3), 432–449.
DiDonato, T. E., & Jakubiak, B. K. (2016). Strategically funny: Romantic motives affect humor style in relationship initiation. Europe’s Journal of Psychology, 12(3), 390.
Gray, Jordan; Difronzo, Taylor; Panek, Cassandra; and Bartel, Tom (2018) « Swiping Left or Right? Effective and Ineffective Dating Profiles, » Concordia Journal of Communication Research: Vol. 5, Article 3. DOI: https://doi.org/10.54416/ZREG7403
Available at: https://digitalcommons.csp.edu/comjournal/vol5/iss1/3
Lamont, E. (2021). The persistence of gendered dating. Sociology Compass, 15(11). https://doi.org/10.1111/soc4.12933
Nexø, L. A., & Strandell, J. (2020.). Testing, filtering, and insinuating: Matching and attunement of emoji use patterns as non-verbal flirting in online dating. Poetics, 83. https://doi.org/10.1016/j.poetic.2020.101477
Sharabi, L. L., et Dykstra-DeVette, T. A. (2019). Du premier courriel au premier rendez-vous : Stratégies d’établissement de relations dans les rencontres en ligne. Journal of Social and Personal Relationships, 36(1), 1–19. https://doi.org/10.1177/0265407518822780