Parler de sexualité comme parent : pas toujours un jeu d’enfant

Résumé

Même si ton modèle de parentalité est l’éloquence et le calme de Jean Milburn dans Sex Education, quand la petite dernière demande c’est quoi un cunnilingus, ça prend de court! On t’a préparé quelques conseils pour aborder la sexualité avec ton enfant et accueillir ses questions gênantes.

Malgré l’existence de la section « Enfants » de Ricardo Cuisine (les cakes pop au chocolat chaud, we see you!), il n’y a aucune recette toute faite pour discuter de sexualité avec nos petit·e·s. Eh oui, l’éducation à la sexualité que l’on reçoit enfant varie énormément en fonction de notre contexte familial, culturel et même de l’école qu’on fréquente (Action Canada, 2020). Si on devient soi-même parent, on peut se retrouver à s’inspirer de l’éducation qu’on a eue – ou essayer de faire complètement l’inverse! – pour tenter d’offrir des réponses aux nombreuses questions de notre progéniture. Et on va se le dire, ça peut être très difficile de savoir par où commencer et quels sujets aborder, quand et comment.

Mon enfant est-il assez mature pour comprendre X ou Y? Est-ce que je vais la traumatiser ou troubler son développement si je lui parle de ça? Est-ce que ma réponse est toujours valide (même si elle date de l’époque où Anne-Marie Losique avait une chaine TV cochonne)?

Pas de panique! Avec la collaboration d’Olie Éducation, une plateforme d’éducation à la sexualité pour les parents, on t’aide à aborder le sujet avec ton enfant en toute confiance.

Pourquoi parler de sexualité avec son enfant, au juste?

La sexualité, c’est pas mal plus que la infamous puberté ou la fameuse question « d’où viennent les bébés? » #Cigogne. C’est une formidable opportunité pour aider ton enfant à mieux se connaitre, à comprendre son intimité et même à renforcer des compétences essentielles comme la gestion des émotions et des relations. Pas encore convaincu·e? Ok ok tough crowd.

Voici 3 raisons de parler de sexualité avec ton enfant :

1. Pour lui permettre de développer des relations super saines

Une éducation à la sexualité adaptée à leur âge aide les enfants à construire des relations basées sur le respect, la communication et l’empathie. En abordant des sujets comme les parties du corps, les relations, le respect de soi et des autres, le consentement, les ITSS et les violences dans les relations intimes (Gouvernement du Québec, 2024), les enfants apprennent à :

  • valoriser leur corps et leurs émotions, renforçant ainsi leur estime;
  • intégrer des valeurs comme l’égalité et le respect de la diversité;
  • établir des repères clairs sur ce qui est approprié (par exemple, que l’exploration de leur corps se fait en privé, pas devant la famille élargie aux Fêtes).

2. Pour prévenir les violences à caractère sexuel et miser sur le consentement

Parler de sexualité sans tabou est également un moyen de prévenir les comportements à risque et de protéger les enfants contre les agressions sexuelles (Descheneaux et al., 2018). Une éducation ouverte leur permet de :

  • comprendre l’importance du consentement et de respecter les limites des autres;
  • reconnaitre les signes de situations potentiellement dangereuses;
  • développer la confiance nécessaire pour se confier à un·e adulte;
  • et se sentir soutenu·e pour dénoncer toute situation d’abus.

3. Pour l’aider à comprendre son corps

En discutant des transformations physiques et émotionnelles dès le plus jeune âge, tu aides l’enfant à normaliser et à dédramatiser ce qui l’attend (Organisation mondiale de la Santé). Ça lui permet de :

  • poser des questions sans gêne sur les hormones et le corps humain;
  • recevoir des informations fiables et adaptées à son âge (laisse ton vieux cahier de bio du cégep dans le grenier por favor);
  • voir chaque étape comme une aventure excitante plutôt que comme une montagne infranchissable!

Mais… on commence par quoi et quand?

Parler de sexualité avec son enfant dès 2-3 ans, ça peut sembler précoce, mais c’est une base essentielle! À cet âge, les enfants explorent déjà leur corps, leurs émotions et leurs relations.

Voici quelques idées de sujets à aborder selon l’âge de l’enfant (UNESCO, 2018) :

  • Petite enfance (0-5 ans) : Garde ça simple! Parlez ensemble des noms des parties du corps, du consentement et du respect des limites. Par exemple, explique que certaines parties de notre corps sont privées et qu’on ne les touche qu’avec son propre accord. Ça aide les enfants à intégrer des notions de respect de soi et des autres.
  • Enfance (6-9 ans) : C’est le moment d’introduire les bases de la naissance et les différences entre les sexes. Par exemple, tu pourrais dire : « Les bébés grandissent dans le ventre de la personne qui les porte. » Ça ouvre la porte aux questions tout en gardant ça accessible.
  • Pré-adolescence (10-12 ans) : Ici, les émotions et les changements physiques sont les thèmes par excellence à explorer. Discutez ensemble des amitiés, des transformations de la puberté et du respect dans les relations. Les enfants peuvent poser des questions plus poussées et c’est une bonne occasion d’en parler ensemble de façon ouverte et positive.
  • Adolescence (13 ans et plus) : Avec les ados, abordez ensemble les relations amoureuses, la sexualité active, la contraception et les ITSS. C’est le moment de discuter plus en profondeur du respect des limites et de la gestion des émotions, en répondant à leurs questions sans jugement. Et, who knows, à partir de cet âge, ce sera peut-être le tour de ton enfant de t’apprendre certaines choses!

Comment aborder les conversations d’éducation à la sexualité?

Tu commences à t’en douter : les discussions sur la sexualité ne se résument pas à une seule et grande conversation de 69 minutes, merci bonsoir! Elles se déroulent tout au long de la vie de l’enfant et chaque échange est une opportunité d’apprendre.

Voici 7 astuces à garder en tête lors de ces nombreuses discussions :

1. Créer une atmosphère de confiance (et être à l’aise… avec les malaises

Établir une communication ouverte dès le début permet de rendre ces échanges naturels (Wilson et al., 2010).

  • Poser des questions sur la sexualité ne sera pas plus stressant pour ton enfant que de demander ce qu’on mange pour le souper (arghhh pas encore des chops de porc au ketchup!).
  • Et toi là-dedans? Tu deviens un ti-peu comme le Gandalf qui guide ton enfant dans l’univers des relations et des émotions – de quoi le ou la rassurer tout au long de son parcours ou de son parkour, c’est selon.

2. Écoute active et sécurité

Il faut d’abord créer un espace où l’enfant se sent à l’aise de poser ses questions (Malacane et al., 2016). Si une question qui te semble sensible surgit, accueille-la sans jugement : « Wouah, je suis content·e que tu poses cette question! Qu’est-ce que t’aimerais savoir exactement? » Ça l’encourage à préciser ses pensées et ses préoccupations, et pas simplement à écouter passivement.

3. Prends la balle au bond!

Parler de sexualité, ça devrait être aussi naturel que de parler de ses émotions, de l’école ou de la robe d’Elsa dans Frozen. Si ton enfant pose une question pendant que vous regardez un film ou une série (c’est peut-être un peu tôt pour Euphoria), saisis l’occasion pour en parler. Par exemple, si un personnage dit quelque chose sur l’amour, demande-lui ce qu’il ou elle en pense. Ces p’tites discussions rendent le sujet vrrrraiment moins intimidant (Malacane et al., 2016; Jaccard et al., 2002)!

4. Jargon, c’est non! Utilise un langage adapté à l’âge de l’enfant

Avec les tout-petit·e·s, utilise des mots simples. Par exemple, au lieu de dire « rapports sexuels », tu peux parler de « comment les bébés sont faits » (MSSS, 2025). Au fur et à mesure que l’enfant grandit, tu peux introduire des concepts plus détaillés. Dans tous les cas, c’est important d’utiliser des termes exacts comme « pénis » et « vulve » pour les normaliser. On dit bye bye à la fleur et l’abeille une bonne fois pour toute, ok la gang?

5. Be booksmart : fais appel à des ressources externes

N’hésite pas à utiliser des ressources comme des livres, des vidéos ou des jeux adaptés à l’âge de l’enfant pour enrichir ces conversations. On te recommande évidemment l’application Olie, le répertoire de ressources de la Coalition ÉduSex, la liste à la fin de cet article et (shameless plug!) tous nos contenus au Club Sexu. Tu pourrais être surpris·e d’apprendre des trucs utiles pour toi aussi (et te mettre à jour)! Une raison de plus de faire preuve de curiosité et de continuer de s’informer sur la sexualité en plus de te sentir mieux outillé·e à répondre aux questions de ton enfant (Malacane et al., 2016).

6. Répondre aux questions plus touchy

Quand un·e enfant pose une question délicate, essaie de ne pas réagir trop fortement, même si la question te gêne solide (Afifi et al., 2008). Par exemple, si ton enfant de 6 ans te demande : « Qu’est-ce que ça veut dire, faire l’amour? », prend une grrrrrande respiration digne d’un cours de breathwork et réponds de manière sereine : « C’est une bonne question. Faire l’amour, c’est un moment intime et privé quand des grandes personnes se font des caresses. » (Naître et Grandir) Drama évité!

7. C’est correct de pas savoir!

Dans les situations où l’on ne connait pas la réponse, c’est vraiment correct de tout simplement l’admettre. Dire « Je sais pas, mais… on cherche ensemble? » peut être une excellente occasion d’apprendre avec l’enfant tout en renforçant l’idée que la sexualité est un sujet sur lequel il est normal d’être curieux·se et d’aller chercher des informations (Naître et Grandir).

Quand et pourquoi consulter un·e professionnel·le pour des questions plus complexes?

Les questions que posent les enfants peuvent nous surprendre ou même nous inquiéter, surtout si elles semblent inappropriées pour leur âge. Si la question te surprend, tu peux dire : « Oh citron, je m’attendais pas à cette question! Mais tu fais bien de la poser. »

Tu peux aussi clarifier avec ton enfant ce qu’il ou elle souhaite savoir. Parfois (tout le temps), nos perspectives d’adulte influencent notre façon de voir les choses. Demande-lui : « Tu veux dire quoi par là? » ou « Qu’est-ce qui te fait poser cette question? » Ça te permettra de répondre précisément à ses préoccupations sans entrer dans des détails compliqués à comprendre ou à entendre (Akers et al., 2011).

Si, après réflexion, tu as encore des inquiétudes ou que la question dépasse tes connaissances ou ton niveau d’aisance, consulter un·e professionnel·le comme un·e sexologue peut être utile.

Est-ce que les comportements de mon enfant sont dans la norme?

C’est normal que les enfants adoptent certains comportements sexuels, souvent motivés par la curiosité. La plupart des enfants de 3 ans ont déjà manifesté un comportement sexualisé, et ça culmine généralement entre 3 et 6 ans, période où commencent l’intégration des normes sociales et le développement d’une certaine pudeur (Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, s.d.).

Voici quelques exemples de comportements sexuels dans la norme selon l’âge (Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, s.d.; Naître et Grandir, 2019) :

0-2 ans :

  • Découverte des organes génitaux, souvent sans gêne
  • Réflexes corporels normaux, tels que des érections et de la lubrification

3-5 ans :

  • Jeux de rôle comme « jouer au docteur·e »
  • Questions sur les bébés et l’identité de genre
  • Autostimulation plus présente, comme l’enfant est plus habile avec ses mains

6-8 ans :

  • Développement de la pudeur
  • Jeux de comparaison entre ami·e·s (ex. : se montrer les parties génitales)
  • Augmentation des questions liées à la sexualité

9-12 ans :

  • Développement d’un intérêt amoureux pour les autres
  • Masturbation liée au plaisir
  • Émergence de fantasmes sexuels

Parler de sexualité avec ton enfant, c’est une occasion de stimuler sa curiosité, mais aussi la tienne! Intéresse-toi à ses émissions préférées (Pat’ Patrouille, here we come), pose des questions sur ses influences du moment et explore son monde. Grâce à des discussions bienveillantes et adaptées, tu contribues à normaliser la sexualité comme une partie naturelle de sa vie. Chaque question posée devient une opportunité pour bâtir votre relation et votre complicité, profites-en!