Deux œufs, bacon, ITSS : comment jaser de dépistage en gang de façon décontractée

Si tu permets, je vais mettre la table : on est dans un restaurant. Ou mieux, sur la terrasse ombragée d’un de nos appartements. Il fait juste assez humide pour donner envie de siroter des mimosas maison entre ami·e·s, quelque part entre 11 h 30 et 15 h. 

Toute la gang est réunie. J’ai réchauffé des croissants, notre chumme Caroline a fait des cretons végés pis toi, tu nous partages tes recommandations d’ostéopathes et de cliniques queer-friendly. On se montre des mèmes. On rit. On parle de nos soirées chaudes du mois dernier. Je dis : « Han, c’est qui cette date-là? C’est nouveau? Dis-moi touuuuuuuuuuuuut. » Caroline prend une autre bouchée de cretons pis dit : « T’es-tu fait tester? »

Ça te prend par surprise.

Tu fais une drôle de face.

La règle implicite du repas dominical vient d’être rompue. Caroline t’a cassé ton party de fesses. Ou, enfin, c’est ce que tu te dis. Tu te dis : « Ma gang de brunch-lovers devrait me souhaiter autant de plaisirs charnels que je désire! » Tu as raison. On t’en souhaite. On t’en souhaite tellement, Caro pis moi, du sexe suant et passionné… mais comme pour un café trop chaud, il vaut mieux tester la marchandise avant de porter le délice à ses lèvres. 

Je pose ma main sur ton épaule, je dis : « Veux-tu qu’on y aille ensemble? Je suis due moi aussi. »

Je dis ça avec nonchalance. Je dis ça sur le ton d’une fille qui te rappelle de payer ton loyer parce qu’on est le premier du mois. Tu souris. Ça se relâche dans tes épaules. « C’est vrai », tu te dis. « C’est vrai que c’est une bonne idée. » 

On sort nos cells. On se booke un rendez-vous. Caro itou. On termine nos troisièmes tasses de café filtre. Il fait chaud. Humide. On parle de nos envies de poser nos langues sur des corps frais. Je parle de sucer un pénisicle.

C’est ce que j’appelle un brunch réussi.

Loin de moi l’idée de t’obliger à manger à ma table, ou d’aimer bruncher tout court, mais l’été s’en vient et je voudrais qu’on se rappelle que d’inciter notre entourage à se faire dépister régulièrement, c’est une méchante belle façon de dire je t’aime. Le soleil te va bien. Rappeler à son ami·e qu’il ou elle devrait penser à son prochain dépistage, au final, c’est simplement lui dire : « Je te préfère en santé, les cuisses libres d’inquiétudes. »

On se sent pas toujours à l’aise de parler d’infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS). C’est sûr que c’est plus drôle de bruncher pis de se raconter une histoire de gars qui glissent sur du lubrifiant que de prendre rendez-vous dans une clinique pour se twister un coton-tige dans la gorge, de se battre pour viser dans le pot à pipi ou de devoir sortir deux fois de la cabine d’échantillonnage parce que le iPad éprouve des difficultés. C’est sûr, mais justement… pourquoi ne pas faire les deux? 

Brunch et dépistage. Un wine and dine nouveau genre.

Je suis pas naïve. C’est pas tout le monde qui est aussi à l’aise pour parler de sexualité. Je sais bien que le plus difficile, c’est souvent de trouver comment démarrer la conversation. Voici donc, sur le side, quelques idées pour amener le sujet sur la table :

  1. Utiliser de savoureux jeux de mots pour mettre l’eau à la bouche de vos ami·e·s. Je vous offre celui-ci gratuitement : « Ayoooooye! Ta flamme est aussi chaude que mon café. Ça pourrait faire un frette que tu te fasses pas dépister, non? »
  2. Rendre sa grande sagesse anodine : « Avoir confiance qu’on a rien, c’est jamais aussi efficace qu’un résultat de test… je dis ça, je dis rien. »
  3. En cas de doute, mêlez-y de la guacamole. C’est toujours gagnant : « Je paie l’extra-guacamole à la personne qui s’est fait dépister le plus récemment. »
  4. Pour les réticences plus fortes, y aller en gang, ça peut faire moins peur. C’est moins stressant. C’est pareil comme s’organiser un brunch, mais avec plus de Q-tips… pis, why not, organisez-vous un vrai brunch après vos tests. Là, c’est du fun garanti! Pis vous avez un brunch boni si vous coordonnez vos appels de résultats. 

Bien que je recommande vivement l’ajout d’oeufs brouillés et de bacon croustillant à ta conversation, elle peut aussi bien se faire entre deux shots de téquila ou dans le trafic sur le Métropolitain. L’important, c’est de ne pas avoir honte de s’en parler ensemble. Pis surtout de parler au je. À ce qui paraît, ce truc-là, c’est bon pour toutes les conversations. Je te le dis, regarde, je vais le faire. 

C’est quand la dernière que toi, tu t’es fait dépister? Moi, Ève Landry, je me suis fait dépister un après-midi de mars et j’y retourne dans une semaine au moment d’écrire ces lignes. T’as-tu peur d’y aller? Maudit que moi aussi, la fille qui a le même nom qu’une comédienne, je déteste la prise de sang. J’ai toujours le feeling que je vais m’évanouir. C’est pas long, mais c’est surprenant quand ça entre. Enfin. 

T’as vu? C’était pas si tough finalement de parler au je.

Par contre, attelle-toi, parce si tu te mets à avoir ces conversations-là, je suis sûre que comme moi, tu entendras d’EXCELLENTES FAUSSES RAISONS pour ne pas se faire dépister. Genre : c’est un gars que je connais bien. 🚩 Ou bien : on s’est juste touché quinze minutes. 🚩Ou encore : elle a pas eu de nouvelles partenaires qu’a dit. 🚩Surtout quand on sait qu’on a souvent aucun symptôme, le dépistage, c’est juste une bonne idée. Ça prend 15 minutes. Quinze minutes pour avoir la paix d’esprit, c’est vraiment pas long! Sois en convaincu·e : se faire dépister, c’est la bonne chose à faire pour elles, pour eux, pour toi et pour tout le monde. 

Pis, ça tombe bien… on est en plein DépistaFest! Je dis ça, je dis rien, mais… on a un grand menu de cliniques partenaires que tu peux visiter avec ta gang.

Pour terminer, voici les coups de coeur du Club côté places à brunch pas piquées des vers :